- Les Echos -
Despite the increasing success of coffee single serving systems, Melitta sticks to its traditional filter coffee and improves and capitalises on it, which is also the company\'s core business.
L'engouement pour les machines expresso va-t-il signer la fin du filtre à café ? En innovant, Melitta, qui fête ses cent ans, entend prouver le contraire.
Melitta a deux atouts. Tout d'abord, le café reste la boisson préférée des Européens : 72 % des Français, par exemple, en consomment quotidiennement. Le marché est donc porteur. Et même si l'expresso et les machines à dosette connaissent un développement fulgurant depuis le début des années 2000 (avec notamment Senseo, Tassimo, Nespresso...), lors du petit déjeuner, beaucoup continuent de préférer le café filtre. Ensuite, la marque capitalise sur sa position de leader et sur sa renommée incontestables. Selon un sondage Sofres 2007, quelque 76 % des Français lui font confiance et considèrent qu'elle vend des produits de qualité. Et de fait dans les grandes surfaces, Melitta détient encore 65 % du marché des filtres à café en valeur, distançant largement les marques de distributeurs (31,7 %) et les premiers prix (3,3 %).
Un tableau idéal ? Pas tout à fait car, si le nombre de cafetières filtre vendues chaque année continue de progresser, les ventes de filtres, elles, ne cessent de reculer (- 3,8 % en France en 2007 et - 4 % anticipés en 2008). Conséquence malgré tout de l'" effet dosette " mais aussi de l'érosion de la consommation de café, essentiellement pour des raisons de santé.
C'est dans ce contexte que Melitta fête, cette année, son 100e anniversaire, ou plutôt celui du filtre à café. Présent dans le quotidien de tout un chacun, ce petit accessoire de papier résulte de l'inventivité d'une mère au foyer allemande : Melitta Benz, trente-cinq ans, résidente de Dresde. Pour en finir avec les résidus de marc de café au fond des tasses et des cafetières, elle a l'idée d'utiliser une feuille de papier buvard d'un des cahiers d'école de son fils, sur lequel elle verse le café moulu puis l'eau chaude. Le premier filtre à café est né. Pour marquer dignement l'événement, Melitta a prévu de commercialiser en France deux modèles vintage de machines à café, Aromaboy et Aroma Excellent Therm, déjà largement vendus ailleurs en Europe et qui, pour l'occasion, ont bénéficié d'un léger toilettage. Ils seront distribués à partir de septembre dans certains hypermarchés et sur Internet.
Performances améliorées
Mais un siècle après sa naissance, la marque est à un tournant. Pour se maintenir, elle a conscience qu'elle doit innover. Et se différencier. C'est dans cette perspective qu'elle a, ces dernières années, travaillé sa gamme de filtres pour en améliorer les performances. A côté du filtre classique, Melitta a sorti des modèles biodégradables : " natura ", composé à 60 % de fibres de bambou (1999), " doux " et " intense " (lancés tous deux en 2001), ainsi qu'un filtre " doseur " (2007), qui permet d'ajuster la quantité de café en fonction du nombre de tasses souhaitées et enfin le dernier né, en mars, le " gourmet ", qui promet de révéler un maximum d'arômes, quel que soit le café utilisé.
" Le filtre n'est plus seulement un accessoire pour faire du café, il participe à son goût et à sa qualité ", souligne Nathalie Gamby, chef de groupe marketing pour la France. Cette stratégie produit a permis à la marque de maintenir son chiffre d'affaires. " Même si nous avons perdu 0,5 % de part de marché en volume, nous sommes stables en valeur. Ce qui, dans le contexte général de baisse et pour un produit qui n'est pas investi émotionnellement par les consommateurs, est un bon résultat ", ajoute-t-elle.
Reste que, si le filtre à café représente les deux tiers du chiffre d'affaires total du groupe (1,25 milliard d'euros), il ne correspond qu'à un tiers des ventes réalisées en France (160 millions d'euros). Il faut dire que le marché hexagonal est un cas particulier. En Allemagne, en Autriche et en Suisse, Melitta a depuis des années diversifié son offre en proposant d'autres produits de petit électroménager, comme les cafetières, ayant une valeur marchande plus élevée que les filtres. Dans l'Hexagone, la première cafetière filtre n'a été commercialisée que début 2007. C'est pourquoi, actuellement, 57 % de son chiffre d'affaires est réalisé par des produits n'ayant pas de lien direct avec la préparation du café : il s'agit des emballages ménagers distribués sous les marques Albal et Handy Bag (films plastique, papier aluminium, sac alimentaire, sac de congélation, sac-poubelle...). Deux marques appartenant à Cofresco, dont Melitta est propriétaire à 65 % depuis le milieu des années 1990.
Elargir sa gamme
Pour maintenir son activité historique, l'entreprise a donc bien conscience qu'il lui faut élargir la gamme des produits liés au café. D'où l'apparition en septembre sur le marché français d'une nouvelle cafetière filtre. Elle sera suivie, à l'échelle de l'Europe, du lancement d'une bouilloire et d'une machine expresso (en octobre et novembre) et, pour Noël, de celui de Caffeo, une gamme de machines dites automatiques qui en plus du procédé expresso se chargent au préalable de moudre le café. Selon Nathalie Gamby, ce marché a un réel potentiel de croissance, à en juger par les habitudes de consommation des autres pays européens. " En Allemagne, en Suisse et en Autriche, 9 % des foyers sont équipés de machines automatiques alors qu'ils ne sont que 1 % en France. " Caffeo revendique plusieurs innovations comme un double réservoir de grains et un dispositif breveté permettant de varier le goût au gré de ses envies.
Même pour les machines à café filtre, plus classiques, Melitta joue là encore la carte de l'innovation. Le modèle qui sortira en septembre comprendra un sélecteur d'arôme, pour un résultat plus doux ou plus corsé. L'objectif est, dès cette année, de doubler ses ventes de cafetières filtre (5,8 % de parts de marché en hypermarché en 2007 et 170.000 unités vendues) et d'atteindre, d'ici à 2012, 6 points de marché sur l'ensemble des gammes (filtre, expresso, automatique...). Par comparaison, en Allemagne, Melitta comptabilise 10 % des parts de marché des machines à café. Un objectif ambitieux, certes, mais l'ancienne petite entreprise familiale a un avantage, en termes d'image : elle est, explique Nathalie Gamby, la seule à maîtriser l'intégralité du processus de préparation du café (en proposant des filtres, des accessoires, des machines à café, des produits détartrants et même du café en Allemagne), quand d'autres marques concurrentes, comme SEB, Philips, Braun ou Siemens, commercialisent aussi bien des aspirateurs, des fers à repasser ou des robots ménagers. " Il faut innover sans se disperser et cultiver son savoir-faire ", résume-t-elle. C'est la ligne de conduite que s'est fixée l'entreprise, d'une dimension aujourd'hui internationale mais qui n'est pourtant pas cotée en Bourse et qui tient à conserver sa culture familiale. Rien de plus logique, donc, de trouver à sa tête les trois petits-fils de Melitta Benz : Thomas, Stephen et Jörg.